A comme Adolescence

Et toi, ton adolescence, ça s’est passé comment ? Pour ma part, je conserve de cette période initiatique, le souvenir encore vif du mal-être permanent de n’être pas assez ; ou bien trop. Trop grosse, à une époque où Estelle Lefébure, Linda Evangelista et Claudia Schiffer livraient leurs contours parfaits dans des magazines que je feuilletais par pur masochisme. Trop gras, mes longs cheveux que je brossais à outrance pour tenter de leur donner un volume jamais atteint, et pour cause. Trop déprimée, en découvrant chaque matin l’emplacement qu’avaient choisi mes nouveaux boutons d’acné pour venir orner un visage parfaitement ingrat et gras, lui aussi… C’est à cette période qu’une rébellion générale de mes pores s’opérant quotidiennement, mes aisselles et mes pieds se mirent à mener une vie olfactive très indépendante de la mienne, comme pour mieux signaler ma présence là où j’aurais assurément préféré disparaitre. Quelle délectation de voir se transformer mes doux duvets d’enfant en poils raides ou frisés selon leur localisation et dotés d’une vigueur à faire pâlir du désherbant. Quel bonheur d’entendre régulièrement mon proche entourage me demander pourquoi je faisais la gueule, alors que moi-même je n’en savais strictement rien. Et puis mon look, clairement inspiré d’un catalogue d’emballages, toute partagée que j’étais entre ma volonté de cacher mes formes avec les pulls de mon grand-père et celle de me donner un “style”, fagotée d’une veste militaire ; le tout agrémenté de mes baskets fétiche, mes Ilie Nastase. Je me souviens de mon amour irrépressible pour la procrastination, de la passion que je vouais à Mel Gibson, Olivier de Kersauson et Humphrey Bogart, de mon chien Rex, qui lui seul me comprenait. Merci à toi ô adolescence, de m’avoir laissé ton empreinte prégnante, m’affranchissant ainsi du probable destin de ces biques acariâtres, promptes à critiquer les “jeunes d’aujourd’hui”.

 

 

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