À quoi bon réviser puisque je ne l’aurai jamais ? Ce postulat posé, encore fallait-il pour ne pas être démasquée, que mes parents pensent que je mettais toutes les chances de réussite de mon côté. Ainsi avais-je organisé mes pseudo-révisions de façon à ce que l’illusion soit parfaite. J’étalais donc stratégiquement l’ensemble de mes cahiers, stylos et livres sur mon bureau puis, non sans avoir pris la peine de fermer à double tour le verrou de la porte d’entrée, je passais mes après-midi devant la télévision. Mon plan était infaillible, dès que j’entendais une clef pénétrer dans la serrure, avec la maitrise d’un ninja, je n’avais alors que quelques secondes pour éteindre la télé et filer dans ma chambre. Je me rappelle encore de la satisfaction de ma mère venant m’embrasser, rassurée de voir sa fille si étonnamment investie et trimeuse. Une fois passé le temps de mes “harassantes” révisions et si efficace que fut mon subterfuge, je n’échappai pas à l’examen. Ne pouvant plus compter que sur mes seuls acquis, je m’en allais pas très vaillante affronter l’épreuve tant redoutée. Le Graal, trophée si convoité, pourtant aussi craint qu’inutile, comparativement au bénéfice immédiat d’un permis de conduire. Au fond, le Bac c’est comme le Scrabble, il ne suffit pas d’être bon, il faut aussi avoir un bon tirage. Une note juste au-dessus de la moyenne dans un gros coefficient ; un oral où le prof pris de pitié me griffonne un sujet que je maîtrise davantage que celui initialement tiré au sort ; un autre qui en passant dans les rangs rectifie mes erreurs à l’écrit… J’en voudrais toujours un peu à cette amie qui, convaincue que je n’avais pas pris la peine de me déplacer pour affronter le verdict des résultats, a téléphoné chez moi. Et alors que, voulant partager ma stupéfaction j’appelais à mon tour pour annoncer la grande nouvelle à ma mère, elle m’informait flegmatique qu’elle était déjà au courant. Ceci étant, avec ce que j’avais bossé comment pouvait-il en être autrement ?
A comme Adolescence <— —> C comme Cauterets
