Durant toute mon enfance, dès lors qu’elle me gardait chez elle, ma tendre grand-mère provençale n’a eu de cesse de vouloir me distraire et me transmettre son savoir. Ainsi, la saison venue je participais à l’incontournable et traditionnelle installation de la crèche de Noël. Tout d’abord, nous allions ramasser quelques plaques de mousse fraîche dans les pinèdes environnantes. Puis, mon grand-père installait sur le buffet du salon un grand plateau en bois d’environ un mètre vingt par cinquante centimètres, pourvu d’une guirlande lumineuse, l’ensemble servant de support à la scène pastorale. Une fois la mousse répartie sur le plateau, de telle sorte que soient créés divers petits reliefs, ma grand-mère disposait les maisonnettes ainsi que l’étable qu’elle avait elle-même confectionnées à l’aide de fines tranches de bouchons en liège collées entre elles. Astucieusement dissimulées sous la mousse, les ampoules de la guirlande venaient s’insérer sous chaque maison afin que celles-ci soient éclairées de l’intérieur. Une fine rivière en papier aluminium venait parfaire ce tableau. Le décor fin prêt, arrivait le moment tant attendu de l’ouverture des boites dans lesquelles étaient rangés les santons. Des santons d’argile dits “puces” car hauts de deux centimètres tout au plus, fragiles et faits maison pour la plupart. Après les avoir oubliés durant presqu’un an, je les redécouvrais avec fébrilité, déroulant religieusement de mes petites mains leurs protections en papier de soie. J’étais alors chargée de les faire passer à ma grand-mère qui, tout en les installant délicatement, me racontait la raison d’être de chacun. Lou Ravi, Lou boumian, Lou Tambourinaire, les rois mages…, j’écoutais passionnée ses explications captivantes. Durant des semaines, cette merveilleuse crèche faisait l’objet de tous les compliments, jusqu’à ce qu’elle se volatilise discrètement sans que je ne m’en aperçoive, sans doute absorbée par les conséquences récréatives du passage du père Noël.
R comme Randonnée <– –> T comme Ti’punch
