T comme Ti’punch

Je ne suis sans doute pas la seule à avoir constaté que mes perceptions gustatives sont intimement liées aux endroits où je me trouve. Que les aliments et les boissons que j’ai pu découvrir dans un lieu et dans des conditions spécifiques perdent une grande partie de leur saveur lorsque j’y goûte de retour chez moi. Car pour tenter de raviver mes souvenirs il m’arrive parfois de me confectionner de pâles, voire désolantes reproductions, n’obtenant bien souvent que le désir nostalgique de retourner à la source de mes expériences sensorielles. Ainsi voudrais-je repartir en Martinique pour siroter un ti ’punch les pieds enfouis dans le sable ; sous le soleil brésilien pour me rafraîchir de divines caïpirinhas à bord de ce vieux voilier en bois ; dans les montagnes de mes cousins des Alpes pour trinquer autour de l’incontournable cubi de vin blanc. J’aimerais revenir en Angleterre pour vérifier si les baked beans en boite que l’on m’avait servis sur un toast grillé sont toujours aussi étonnamment bons ; au nord de la Finlande par moins trente degrés pour me réchauffer l’estomac avec la meilleure saucisse grillée au feu de bois que j’ai jamais mangée de ma vie ; à Saint-Malo intra-muros pour pouvoir enfin me racheter ce fabuleux kouign-amann ! J’irais aussi reboire une horchatta sur la place Mayor de Madrid ; dans les rues de New-York pour grignoter un pretzel ; déguster un fiadone sur les remparts de Bastia ; à Orlando pour retrouver ces incroyables potato skins ; me régaler d’une dizaine de pintxos dans ce bar de Begur… Je suis extrêmement reconnaissante aux personnes et aux ambiances d’alors d’avoir si généreusement contribué à amplifier ces douces sensations, enfouies comme un trésor dans ma mémoire papillaire et émotionnelle. Mais au fond, ai-je vécu toutes ces expériences pour rêver de les renouveler ou bien restent-elles ainsi gravées pour me pousser à en vivre de nouvelles ? Dilemme…

 

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